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Witty Roy Jones

Je n'ai choisi ni le titre ni l'histoire

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23 mai 2016 - 13:10

Travaux en cours



Il faisait frais comme un parpaing de Noël ce jeudi matin quand quand Albert Donaldson émergea de son lit. Considérant l’inconfort de rester en tenue de nuit dans de telles conditions, il se dirigea derechef vers la salle de bain attenante à sa chambre.
Au terme d’une douche qui laissa sa peau écarlate, emprunt des senteurs de bitume du savon que sa femme choisissait avec tant de goût, il se dirigea vers la vasque et le miroir la surplombant.

Il fit une pause, hypnotisé par l’acier Sheffield Silver de son rasoir droit. En cet instant, pomponné, au chaud et reposé, il se laissa aller au simple contentement.

Puis, alors qu’il reprenait le cours de ses pensées, ses yeux s’attardèrent sur le rasoir. C’était un fameux rasoir, une de ces vieilleries familiales, que l’on se transmet de père en fils.
L’histoire de ce « Rodgers » remontait, paraît il à 1820, une époque friande de véritables hachoirs de plus d’un pouce de large que l’on appelait les Magnum Bonum : plus c’est gros, plus c’est bon.
L’époque de Sweeney Todd en sorte.

Une fois rasé de près, séché et coiffé, il se dirigea vers la fenêtre pour laisser entrer les plus vivaces des premiers rayons de soleil. Attirée par ceux-ci qui tombaient en pluie molle dans les flaques de la baignoire, une tenue de jour pointa le bout d’une manche inquisitrice par une embrasure de porte, dont profita la tenue de nuit pour s’enfuir, paniquée.

Albert songea à quel point le paysage à travers la vitre était magique. Athènes avait toujours été une ville très magique elle-même, en fait, raison pour laquelle elle a vu naître les plus grands rationalistes.
Pour l’heure, les collines entamaient leur douce houle tectonique afin que le soleil illumine toujours les temples de la bonne façon, et que le thym, les pins, et la lavande soient correctement secoués.
Les collines étaient démocrates (surtout la Pnyx) : elles avaient rapidement compris l’importance du tourisme.
Cela remplissait de joie le cœur de ce brave homme.

Une voiture klaxonna, le rappelant vers la ville, et il discerna une forme évoluant sur le long zig-zag du trottoir en contrebas. À mesure qu’elle s’avançait, il put constater avec agacement qu’il s’agissait de Roy Jones.

Roy était un « reputation broker », un de ces nouveaux jeunes requins qui faisaient dans le trafic légal de popularité. Athènes était un marché juteux pour la réputation, car on y trouvait beaucoup de descendants d’Aristote, reconnu par l’Église, de Platon, reconnu par les scientifiques, et de Diogène, reconnu dans la rue.
Ces gens-là pouvaient vous arracher un « Like » ou un « RT » de valeur pour une bouchée de pain en usant de charme, de duplicité, ou simplement de force brute.

Comme tous ses confrères, Jones était un gorille tiré à quatre épingles. Tout chez lui, en dehors de la géométrie parallélépipédique de son corps, était millimétré, calibré pour le « zéro risque d’image ».
Et ses mains… Des mains parfaites, exquises, aux doigts longilignes prolongés d’ongles parfaitement manucurés.

Par moquerie, on appelait parfois les traiteurs d’intérêts (qui ne pratiquent pas, rappelons le, par convention, le trafic d’influence) les « bichonnés » pour se moquer d’eux, en référence aux mangas pour jeunes demoiselles.
Ou, terme tout aussi moqueur, les Übersexumensch.

Présentement, dans le miroir, Albert n’était qu’un « pomponné » et il se sentit fragile. Il étudia son reflet de pied en cap, usant à cet effet d’une cape de noblesse et d’un Pied du Roy.
Celui-ci était naturellement un bonhomme et aimable, comme un Père Noël de publicité. Des années de « Data Journalisme » l’avaient cependant rendu amer, comme, donc, un Père Noël, mais un Père Noël en cacao couperosé de Brandy.

Et ses mains… Mais quelle honte… Des années à taper dans diverses configurations de claviers inadaptés, comme le KSERTÖ les avaient transformées, à coups de syndromes du canal carpien, méta-carpien, tarsien, meta-tarsien, et panaméen.
Avec le temps, ses doigts étaient devenus pointus, pour mieux s’accrocher aux touches de claviers toujours plus chargés et plus petits.

Donaldson congédia son reflet, qui était, en ce jeudi matin, franchement de mauvais goût. Il était mieux que ça, après tout, il était journaliste ! Data Journaliste !
Un de ses graphiques bien sentis avait même sauvé un bébé mourant !
Mais même le plus héroïque des journalistes, eût-il sauvé un bébé mourant, n’était pas prêt à ce que Roy lui préparait sans doute.
Le soleil, conscient de l’orage à venir, se voila timidement derrière quelques nuages informatiques, et en réponse à la situation, délégua la crise à la pluie, comme tout bon manager. Cela n’augurait rien de bon.

Albert se précipita vers le vestibule d’entrée, et sa main droite fusa vers le crochet qui gardait jalousement ses clefs, signifiant que leur obtention n’était pas ouverte à négociation.
À sa grande surprise, il vit son bras prolongé par le rasoir, qu’il avait machinalement attrapé.
Bouleversé, il le glissa rapidement dans sa poche, avant de s’engager dans l’escalier et vers la sortie de son immeuble.

Alors que la lourde porte cochère claquait derrière lui sur le rythme du boléro, le journaliste pu apercevoir la lueur gourmande dans l’oeil de Roy qui s’approchait

— Écoute, Albert, grogna Roy en le tançant vertement du regard ainsi que le font les vieilles renardes, ce n’est pas que je ne t’aime pas, mais tu dois me fournir ces followers Twitter maintenant. La deadline est passée de 10 jours et tu es déjà à 6317 euros dans le rouge.

L’Übersexumensch secoua ensuite la tête en haussant les épaules.

— C’est mon argent, tu sais, les traités commerciaux internationaux m’autorisent à te le réclamer.

Albert se sentit acculé. Il jeta furtivement un regard en arrière vers la porte cochère, maintenant trop loin car trop effrayée. Il n’y arriverait jamais à temps.
Dans sa poche, ses doigts trouvèrent à nouveau le rasoir. Cela suffit à lui donner un semblant de courage absurde, comme le café aide à croire que la journée sera productive.

Il répondit, froidement :
— Roy, tu me crois vraiment né de la dernière pluie. J’ai personnellement bu une bière avec Maître Eolas un jour, je connais mes droits ! Recule !

Un éclair passant par là jugea suffisamment dramatique d’éclairer parfaitement le rasoir quand il sortit de la poche du journaliste. (*)

Les deux hommes se jaugèrent mutuellement quelques minutes comme deux gentilles et grandes gerbilles papotant sous la pluie battante. Cette fameuse pluie battante d’Athènes qui en avait fait une grande nation militaire d’individus endurcis car roués à chaque averses.
Cette pluie qui battait à l’instant un rythme jazz funéraire endiablé d’Uncle Tom & Uncle James, avec au rôle de la basse les rigoles métalliques.

L’ambiance était Junk/Jazz, emplie d’odeurs de béton mouillé et de rouille en suspension.
Elle avait un goût de laiton, ce laiton classe de speakeasy haut de gamme, pas le laiton administratif qui gardait un goût de tabac bas de gamme.

Le journaliste regarda les mains du requin en face de lui. Absolument superbes, magnifiquement entretenus, tellement… Artificielles !
Ses épaules se relâchèrent alors, et il gloussa un brin, à mi-chemin entre la pintade et le coq de bruyère.

— Mon cher Roy, tu t’arrêtes finalement toujours aux apparences ! Toi qui n’utilises que des moyens artificiels, jetables, tu ne sais pas qu’un tel rasoir peut pomponner un homme.

Puis il prit une grande inspiration, et relâcha ses muscles en même temps que l’air, qui émit un « ouf » de soulagement.

— Je me suis déclaré en banqueroute. Tu sais bien que c’est ce que nous faisons, ici. Tes followers vont être rachetés pour une bouchée de pain par un fond de pension chinois. Je t’encourage à négocier avec eux, mais tu sais bien que tu n’auras jamais ton argent.

Le broker recula d’un pas, choqué. L’éclair fut ultérieurement entendu sur les faits et plaida non coupable.

— N… Non ! Tu ne peux pas avoir fait ça, objecta-t-il, tu mens !
— Non je ne mens pas ! rétorqua Albert, alors maintenant tu prends tes parfaites mains de midinet et tu vas me foutre le camp d’ici avant que je ne trouve un autre usage que ma virile beauté à cette énorme lame !

Roy parut inquiet, et se réfugia derrière ce qui lui paraissait être tout son pouvoir : son portefeuille. Portefeuille dans les yeux d’Albert, à cet instant, comparable à une grande épée de verre.
Mais comme une grande épée de verre ne pouvait pas tenir entièrement dans les yeux d’un data journaliste, celle-ci finit par tomber.

Alors qu’il se frottait les paupières à cause de l’irritation, le sauveur d’enfant (au singulier), entendit effectivement le portefeuille de Roy se briser en 6317 morceaux.
S’ensuivirent les pas du broker finaud telles des claquettes sur le bitume, sur le rythme endiablé d’un Blue Rondo à la Turque effréné mené par l’averse.

Arrivé enfin dans son salon, groggy, Albert se posa dans lourdement dans un fauteuil de passage. Un coussin, étouffé par son poids, se faufila de derrière son dos pour bondir sur le sol, cracha en sa direction, et partit s’affaler sur un divan.

« Au diable la couperose et la goutte, » se dit Albert, « j’ai besoin d’un remontant, et un verre de Brandy ne suffira pas ce soir ».

(*) Si nos protagonistes avaient prêté attention à ce moment-là, le conflit aurait pu être réglé avec profit mutuel.
En effet, un touriste Japonais, Hayagumi Tarou, présent sur la scène, immortalisa l’instant sur Instagram et la photo fut partagée 6317 millions de fois, et des poussières. Une manne qui resta malheureusement inexploitée alors qu’elle aurait pu rendre les trois hommes richissimes.


J'ai énormément d'admiration pour les écrivains qui respectent scrupuleusement leur langue, et autant de mépris pour les poètes qui font de même -
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Message posté le 14:11 - 23 mai 2016

C'est intéressant. Le principe est sympa, partir d'un texte aléatoire pour en faire un "vrai" texte. Dans le cas présent, à mon sens, il manque encore des choses.

Je me suis sentie perdue dans ce texte. L'univers qui semble à la fois magique et actuel n'es pas assez défini. Je n'ai pas su si les références musicales, les objets bougeants, etc... étaient des métaphores ou bien la réalité de cet univers. Pour moi, ce texte doit être encore étoffé afin de devenir plus facilement compréhensible. Je ne crois pas que tu aies voulu faire un texte Dadada et pourtant j'ai ressenti un peu la même incompréhension.

L'écriture en elle-même est bonne, c'est vraiment le contenu qui me chagrine.

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Message posté le 15:06 - 23 mai 2016

Citation de Grendelor :
Je ne crois pas que tu aies voulu faire un texte Dadada et pourtant j'ai ressenti un peu la même incompréhension.
L'écriture en elle-même est bonne, c'est vraiment le contenu qui me chagrine.


J'espère bien que si, un peu. J'ai clairement dit que c'était un style inspiré de Boris Vian



C'est un "exercice de style", si tu veux, bien sur que c'est ce que j'ai essayé de faire.
Et si ça peut te rassurer, ce n'est pas "mon" style, juste un exercice.

Permets moi de te poser une autre question : as tu ressenti des choses en lisant ce texte ? Je prends toute réponse, même le dégoût.


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Message posté le 15:29 - 23 mai 2016

Juste de l'incompréhension. Je me suis posée la question tout du long de savoir où est-ce qu'on allait, où est-ce qu'on était, qu'est-ce qui se passait...

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Message posté le 15:55 - 23 mai 2016

D'accord.

Le texte généré automatiquement était il plus clair ?

A considérer qu'il faille intégrer des louforqueries comme :
* Deux hommes qui se regardent comme de grandes et gentilles gerbilles
* L'obsession sur les mains
* Des menaces autour d'une dette et de followers Twitter
* "Son portefeuille à vif comme une grande épée fragile"

Non mais attends, c'est vrai qu'à en discuter, tu me donnes une idée.

Alors c'est parti, exercice de style numéro 2 ;)


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Message posté le 16:05 - 23 mai 2016



Moi qui suis friand de ce genre d'exercices ce fut plaisant de lire quelqu'un en faire un (comme ça l'est à chaque fois). Le défaut de ce type de one shot à la sauce absurde-dada c'est que le texte se retrouve le derrière entre deux chaises : il est à la fois trop précis et pas suffisamment. Trop construit pour s'abandonner totalement aux joies de dada et pas assez pour satisfaire les lecteurs de nouvelles.

Évidemment, il est possible de concilier les deux mais sur un plus grand nombre de caractères peut-être, afin d'instaurer un univers et des personnages développés, et surtout, cohérents. En cela, je pense notamment au court roman de Thomas Lélu, Je m'appelle Jeanne Mass qui est une belle pépite, je trouve.

Malgré tout, et encore une fois à titre personnel, le défaut de ces textes est la fin. Elle est rarement satisfaisante.

Ce que j'ai ressenti : de l'amusement.


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Message posté le 17:18 - 23 mai 2016


Confortablement tapis dans l’épaisseur d’une double cloison, Albert Donaldson s’éveillait doucement Les odeurs familières du petit déjeuner, qui parvenaient de l’autre coté de la paroi, mirent ses sens en éveil, et son appétit en train.

Il déchira un bout de la tranche de bacon qu’il avait obtenue l’avant veille, et mâcha soigneusement, broyant entre ses dents pointues chaque protéine. Quand on avait la taille d’un gremlin, on avait la place pour des poumons ou un appareil digestif.
Aussi digéraient ils tous directement dans leur bouche.

Puis, il attrapa son butin de la veille, et le fit miroiter à la faveur d’une fente dans le contre-placage. Une aiguille à coudre, argentée, brillante, la parfaite épée pour quelqu’un de son gabarit !

Le petit Albert se faufila ensuite rapidement vers le haut de l'entre-murs et la faille vers l'extérieur, jusqu’à la petite lucarne qui donnait sur la vieille ville en contrebas. Ah Athènes, Athènes qui vit avec son temps, mais n’a jamais réellement pu se débarrasser de son pandæmonium, toute cette vie cachée qui la supporte mais qu’elle nie exister.
Athènes et ses grandes collines creuses qui grouillent encore de la vie de l’Hades et de la forge d’Hephaistos, c’est ici que le gremlin se sentait heureux.

Puis il aperçut sur les toits avoisinants une forme, ou plutôt, en y regardant bien, une autre créature comme lui. Un œil non avisé n’y aurait vu que du feu.
Il s’agissait du contremaître gobelin Roy Johnes.

Les gobelins, en cette époque, étaient l’équivalent chez les dæmon des cadres de mi-étage, intelligents, coquets, et, chose notable, « 110 % plus grands » que les gremlins. Et leurs mains anciennement ouvrières étaient maintenant parfaitement manucurées jusqu’au bout des ongles.

Albert déglutit. Il jeta un coup d’œil à son reflet dans la vitre et soupira.
Lui n’était qu’un gremlin, et pas le gremlin vif et habile que l’on s’imagine souvent. Il avait plutôt le profil d’un petit clerc de bureau, souriant, parfois un peu hautain malgré lui… Comme beaucoup d’ouvriers de sa classe, il s’oubliait parfois le soir dans un dé à coudre de Brandy.
Par son intervention fortuite et insoupçonnée, il avait sauvé un bébé humain mourant une fois. C’était un peu tout ce qui donnait du sens à sa vie.

Mais tout aimable sauveur de bébé qu’il aie été, personne n’était jamais prêt à affronter les remontrances d’un contremaître.

Ah, bien sur, Albert avait prévu ce moment, il avait une grande stratégie, un plan infaillible… Mais est-ce que cela allait marcher ? Etait-ce le moment ?

La pluie frappait fort à la lucarne, ce qui, à l’extérieur, serait à son désavantage. Il attrapa de derrière le mur l’aiguille à coudre, et poussa légèrement la vitre.
Dehors, le vent était fort, et l’air était chargé de l’odeur d’ardoise humide des tuiles, et de la mousse qui colonisait les murs.

Le gremlin sauta sur le toit en contrebas, et Roy le rejoint rapidement. Il put vite s’apercevoir de la lueur avide dans les yeux du gobelin.

— Ecoute Albert, lança Roy avec sa voix rocailleuse, appuyée par un regard prédateur qui rappelait les mauvaises rencontre avec un renard, c’est pas que je t’apprécie pas, mais les chiffres sont les chiffres. Tu me dois ton quota de followers, ton retard est déjà chiffré à 6317 euros.

Albert aurait voulu répondre que le quota n’était pas tenable. Que les autres gremlins comme lui ne tenaient plus la cadence.
Bien sur que l’anonymat de l’informatique et de l’internet, et le besoin de main d’œuvre qualifiée et peu chère pour alimenter les réseaux sociaux et sites de critiques, permettaient au petit peuple de vivre.
Mais face aux machines qui étaient maintenant plus rapides que des armées de petites créatures, générer des contenus, des follows, de la réputation, devenaient peu rentables et invivables.

Le petit clerc regarda derrière lui, se demandant s’il avait une dernière chance de renoncer. Au lieu de cela, ses doigts se crispèrent autour du fut de métal.

Il répondit enfin
— Roy, tu me crois né du dernier centenaire.

Ses frêles épaules se crispèrent. Il leva l’aiguille, comme prêt à en faire usage.

Les deux créatures se jaugèrent dans une tumulte de sentiments, telles deux grandes gerbilles, d’ordinaires paisibles, prises dans le brouhaha infernal de funérailles ubuesques présidées par les deux oncles métalleux du défunt.
(nda : non mais désolé, les gerbilles c’est chaud…)

Albert étudia longuement les griffes parfaitement entretenues de Roy.

Puis il soupira. Il était temps qu’il révèle le plan qu’ils avaient tous fomenté.
— Roy, je suis le premier à te le dire, mais nous allons tous faire de même. Nous nous sommes inspirés de nos voisins humains. A compter d’aujourd’hui, je suis déclaré en banqueroute, expliqua Albert.

Puis, il pris le temps que l’information prenne le temps d’être traitée avant de continuer
— En conclusion, tu n’auras jamais ton argent
— Non, hurla le gobelin, tu mens !

Il fit mine de s’avancer vers Albert quand celui ci pointa son épée de fortune en direction de son adversaire
— Je ne mens pas Roy, rétorqua-t-il dans un râle mauvais, tu vas vite t’en rendre compte. Donc maintenant, tu prends tes griffes incapables de déterrer du gravier, et tu dégages voir tes maîtres et leur dire que c’est fini pour nous.

Paniqué, Roy sortit de derrière son dos le petit vestige de portefeuille en écaille de tortue qui lui servait de bouclier et tenta de s’approcher pour dominer son frêle opposant.
Mais celui ci était vieux, et un simple objet d’apparat. Et le contremaître maladroit.

Albert jubila en entendant le bruit du portefeuille, échappé des mains de son propriétaire affolé, se briser en 6137 pièces, en camaïeu orange sur l’ardoise grise.
Il rit nerveusement, puis, enfin, après quelques secondes sous la pluie, joyeusement, du fond du cœur en voyant son oppresseur s’enfuir à toutes jambes.

Ce soir ce serait Brandy pour tous les gremlins d’Athènes ! L’excitation de la révolte les tiendrait tous éveillés jusqu’à la fin de la nuit !


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Mike001 : merci beaucoup, j'apprécie beaucoup un retour aussi complet.

Effectivement, tu pointes des difficultés réelles.
Et cette notion de fin insatisfaisante, effectivement, je la partage, mais je ne suis pas sur que ce soit une "mauvaise chose".

Si c'est aussi endémique à ces textes, comme tu le dis, comment émerge cette dynamique ? (pour le coup, dans le cas précis je ne saurais en faire l'auto analyse)

Je termine ça et j'intègre tes retours :)


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Message posté le 17:57 - 23 mai 2016

Citation de Le salisseur :
Mike001 : merci beaucoup, j'apprécie beaucoup un retour aussi complet.

Effectivement, tu pointes des difficultés réelles.
Et cette notion de fin insatisfaisante, effectivement, je la partage, mais je ne suis pas sur que ce soit une "mauvaise chose".

Si c'est aussi endémique à ces textes, comme tu le dis, comment émerge cette dynamique ? (pour le coup, dans le cas précis je ne saurais en faire l'auto analyse)

Je termine ça et j'intègre tes retours :)


Je suis d'accord avec toi : ce n'est pas une « mauvaise chose ». Chaque approche d'écriture a ses défauts et ses forces, d'autant plus s'il s'agit d'exercices pour s'amuser et/ou pour s'essayer à de nouvelles choses.

Sur de si courts textes absurdes – disons moins de 20.000 caractères espaces comprises pour donner un nombre partial –, je crois qu'il est presque inévitable que la fin ne soit pas pleinement satisfaisante car nous sommes habitués à une construction classique d'une histoire : un début, un rebondissement, une chute. Or l'absurde balaye souvent les règles de narration et donc ne tend pas à cette fin qui met d'accord les lecteurs – voire l'auteur. Mais en soi, je ne trouve pas cela dramatique, puisque l'intérêt de ces textes est généralement dans le jeu avec lesdites règles, plus que le fond.

P.S. : je lirai le second exercice un peu plus tard ;)


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Message posté le 18:04 - 23 mai 2016

Pour ma part, mais Mike en témoignera je ne suis pas fan du dadada, je trouve cette seconde histoire bien mieux que la première dans le sens où, justement, elle a un sens, compréhensible tout de suite. Même connaissant l'intrigue avec la lecture du premier, j'ai suivi avec intérêt le gremlins. J'ai souri et j'étais compatissante envers cet Albert.

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Message posté le 19:47 - 23 mai 2016

"Nous nous regardâmes telles deux grandes gerbilles". Je suis déjà amoureux de cette expression. J'ai le droit de l'utiliser ou tu brevettes ?

Comme Grendelor, j'ai trouvé la seconde histoire plus chouette. Elle avait sûrement l'expérience de la première derrière elle. L'alliance gremlin/twitter est bien fun, il fallait y penser :)

Tu utilises quoi comme générateur automatique ? Ça m'intéresse.

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Message posté le 21:39 - 23 mai 2016

Salut Littérateur. En même temps je ne voudrais pas te donner l'impression d'usurper ce mot: si ça semble ben litté (jusqu'au début: on sort d'un lit), on ne peut pas dire que c soit raté.

Sur ce, en bon lézard, je vais m'estimer lésé par le second texte: on parle d'écailles qui se brisent.. c'est très maladroit, blessant, pis ça fait mal.

Qu'on se le tienne pour dit avant que cette page de travail des textes ne se remplisse de morceaux de followers (à défaut, des flowers feraient l'affaire pour autant que je me sente concerné).

Donc étrangement (et parce que les gremlins comme les gobelins on sait pas trop si ils ont le sang froid ou le sang chaud: du lard ou du cochon comme disent les épidermes mous) j'ai une petite préférence pour le style du premier texte.

Et je mentionnerai (parce qu'être un lézard n'empêche pas d'être punk, ni folâtre, suivez pas mon regard) que pour moi la difficulté de ce genre d'exercice c'est d'arriver à personnaliser les images pas forcément cohérentes avec soi proposées par le générateur d'e-dés. Arriver à parler "soi" avec la langue d'un autre disons.

Et on trouve quelques ajouts personnels tout à fait savoureux (dont ce Diogène reconnu dans la rue ou les nuages informatiques). Qui dans l'ensemble donnent une cohérence sympathique. A ce niveau il est assez difficile de bien gérer le côté "surréaliste" (gratuitement incohérent tel que je l'emploie ici) et le côté "expressif" (références, petites pointes sarcastiques, réflexions fantaisistes). Tu aurais probablement un peu de marge à en juger par les quelques baies juteuses parsemées (on devine un buisson bien mûr quelque part)pour améliorer ça mais c'est déjà bien équilibré.

Le reproche que je ferais au second c'est qu'en voulant piocher dans un champ très cultivé ça fait peut être légèrement plus "emprunté" (et c'est pet rieux: on sait jamais si le grand ö Géhemme ne garde pas le champ et va venir casser les griffes parce qu'on a recraché les graines sans les déclarer). Ca tiendrait à pas grand chose: développer un peu le personnage hors du cliché gremlien (masse travailleuse: et en effet ça commençait à prendre un peu plus je trouve vers la fin).

Cela dit c'est une perception subjective qui disparaitrait probablement à la seconde ou tierce lecture (et si y'a du rab' de lait pour le vin de baies percées à la dive aiguille pourquoi pas du coup). Pas de quoi se regarder telles deux gerbilles pékinoises dans une répétition de Nô.

Sur ce je file filer la pluie... bonne soirée !

Edith Piaf: Nan mais c'est bien hein c'est ce que ma langue a fourché dessus que j'ai pas pu bien siffler tout ça... (des fois que... c'est le Nô ça surement, rien que d'y penser...)

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Message posté le 10:29 - 24 mai 2016

Ah oui, une bonne question que je n'avais pas abordée alors que je voulais le faire, merci de l'avoir levée Lepzunalg.

Ces textes sont publiés sous licence Creative Commons CC-0, donc libres de droit.
Donc oui, si tu veux reprendre ces satanées gerbilles, c'est volontiers.

Je n'ai pas trouvé d'informations de licence claire sur le générateur que j'ai utilisé (difficile question du droit des algorithmes), donc, en l'occurrence, à vos risques et périls.
J'ai utilisé celui-ci donc http://www.plot-generator.org.uk/ outil "Entire Short Story", avec génération automatique de tous les éléments.

@Grendelor, je suis à la fois content et chagriné que cette seconde histoire te plaise, en fait.

Deux heures de "travail" sans effort, contre le double de "vrai travail" pour l'autre. J'ai mis du coeur dans l'une, et écrit l'autre presque par dépit.

J'aime bien les deux, je ne renie pas mon histoire de gremlins, mais pour un exercice, la seconde est "trop facile" si tu veux.

@Mike001 @Redofre
Vous avez tous les deux raison sur le premier texte, il n'est clairement pas abouti en l'état. Pas du niveau de ses inspirations.

"C'est un peu court jeune homme, on aurait pu dire oh, tant de choses en somme" ;)

A minima, on pourrait faire un meilleure amalgame des styles (en se posant la question du bien fondé de faire un renvoi à la Pratchett par exemple).

Et puis en deuxième lecture, il y a des parti pris locaux que l'on peut étendre à tout le texte.
Par exemple, d'un point de vue sensations, la première partie du texte est limite "olfactive" et la seconde très "sonore". En travaillant habilement je postule qu'il est possible d'éviter ce genre de dichotomie.

C'est par contre énormément de boulot, peut être un peu trop pour cet exercice que je voyais plus comme un "impromptu à loisir".
Non que je sois perdu quant à où commencer.
Si on regarde attentivement, le rythme colle bien à la "Rhapsody in Blue" de Gershwin, ça fait une base de travail cohérente.
Et dans ce cas, pousser le délire à fond, et travailler intensivement la prosodie et une versification "5/4" dans l'esprit du Jazz.

Je ne sais même pas si j'ai le niveau pour un truc pareil.

Le deuxième texte... Tu as raison Redofre.
Déjà, les gremlins et les gobelins, tout folkloriques et non protégeables par copyright (sauf à faire de la copyfraud, peu pénalisée) qu'ils soient sont incohérents avec l'idée du pandémonium grec.

En réalité, je ne voulais pas y passer trop longtemps en première écriture. Plonger dans un bestiaire pour sélectionner les bonnes créatures ne serait pas difficile.
En sus, cela apporterait un folklore utilisable qui pourrait enrichir le propos.
(nota : je le fais actuellement beaucoup pour mon roman)

C'est plus facile à faire, donc je vais attendre les corrections de Mike et faire une deuxième proposition plus travaillée.

Merci à toutes et tous !


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Message posté le 18:22 - 24 mai 2016

Je ne me suis pas donné la peine de lire le résultat du générateur (les textes en anglais me font fuir et je ne me prête à l'exercice que pour Vice... de temps en temps).

D'ailleurs j'ai pas trop compris le principe de l'exercice et je suis allé au plus simple : lire les deux textes et les estimer pour leur valeur intrinsèques.


J'aime bien les deux, je ne renie pas mon histoire de gremlins, mais pour un exercice, la seconde est "trop facile" si tu veux.


C'est à peu près ce que je retiens de ces deux lectures :

j'ai vraiment aimé la première version : ses tournures, ses recherches, son ambiance et son relief si particulier (ça fait du bien de lire ça par ici).

La seconde est bien plus convenue et comme tu le relèves, trop rationnelle. Ceci dit, le charme des personnages et de l'univers fait parfaitement son oeuvre.



"J'ai une âme solitaire"
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Message posté le 10:02 - 26 mai 2016

Troisième essai (oui, j'assume, j'ai "que ça à faire")



Confortablement tapis dans l’épaisseur d’une double cloison, Albert Donaldson s’éveillait doucement Les odeurs familières du petit déjeuner, qui parvenaient de l’autre coté de la cloison, mirent ses sens en éveil, et son appétit en train. A la radio, David Brubeck menait un Take Five impeccable, idéal pour se réchauffer l’âme.
Ce matin, l’air était humide et froid. Et il avait un goût d’humus, ce goût qui rappelle que la pluie va remuer la boue et la poussière.

Songeur et grelottant, il déchira un bout de la tranche de bacon qu’il avait bataillée quelques jours auparavant à un gros rat, et mâcha soigneusement, broyant entre ses dents pointues chaque protéine. Quand on avait la taille d’un gremlin, on avait la place pour des poumons ou un appareil digestif.
Aussi digéraient ils tous directement dans leur bouche.
Les chairs qui commençaient un peu à faisander apportaient enfin un panel de protéines plus intéressant que dans leur étal initial aseptisé. Mais il fallait bien manger.

Puis, il attrapa son butin de la veille, et le fit miroiter à la faveur d’une fente dans le contre-placage. Prise dans les épais flocons de poussière, la lumière tombait difficilement et mollement jusqu’à l’objet, le suggérant plus que le révélant, comme timide face à sa tangible réalité.
Une aiguille à coudre, argentée, brillante, la parfaite épée pour quelqu’un de son gabarit !
Quelques minutes de contemplation hypnotique furent interrompues par une cymbale lointaine.

La petite créature se consacra brièvement à ses ablutions matinales dans un rince-œil, et congédia la mite chaude qui lui tenait lieu de tenue de nuit pour accepter le phasme qui l’accompagnait le jour. Ne soyons pas sots, après tout les lutins ne sont pas plus invisibles qu’ils n’ont d’ailes !
Six pattes se recroquevillèrent autour de lui, l’englobant durement, comme lorsqu’on se retrouvait pris dans la mayonnaise, qui comme chacun le sait fige rapidement au contact de la transpiration gremlin. Il ramassa finalement quelques écailles tombées de la mite, les pila sommairement, et s’appliqua la poudre résultante en fond de tein.

Sur le poste, la montée délirante de la Rhapsody in Blue de Gershwin prenait son envol, précisément quand le petit Albert se faufila rapidement vers le haut de la cloison – en notant au passage que des saucisses avaient été laissées dans la poêle du petit déjeuner avec leur odeur gourmande – jusqu’à la petite lucarne qui donnait sur la vieille ville en contrebas.
Ah Londres, Londres qui vit avec son temps, mais n’a jamais réellement pu se débarrasser de son folklore et du petit peuple, toute cette vie cachée qui la supporte mais qu’elle nie exister.
Londres, nœud gordien de lignes de Ley, le cœur qui fait circuler le sang du dragon sur un immense tempo syncopé à la Joplin, ses grands édifices vides et galeries profondes qui grouillent encore d’une vie inconnue…
C’est ici que le gremlin se sentait heureux.

Bientôt, il aperçut sur les toits avoisinants une forme, ou plutôt, en y regardant bien, une autre créature comme lui. Un œil non avisé n’y aurait vu que du feu.
Il s’agissait du contremaître gobelin Roy Johnes.

Les gobelins, en cette époque, étaient l’équivalent chez les lutins des cadres de milieu d’étage, intelligents, coquets, et, chose notable, « 110 % plus grands » que les gremlins. Et leurs mains anciennement ouvrières étaient maintenant parfaitement manucurées jusqu’au bout des ongles.
Grands frères protecteurs il y a des siècles, ils avaient troqué leurs armes de guerriers pour des armes d’apparats, vestiges des objets de vanité des humains… Carnets de bal en ivoire, porte chapelets de nacre, tout était détourné pour l’apparat militaire.

Albert déglutit. Il jeta un coup d’œil à son reflet dans la vitre et soupira.
Lui n’était qu’un gremlin, et pas le gremlin vif et habile que l’on s’imagine souvent. Il avait plutôt le profil d’un petit clerc de bureau, souriant, parfois un peu hautain malgré lui… Comme beaucoup d’ouvriers de sa classe, il s’oubliait parfois le soir dans un dé à coudre de Brandy.
Le Brandy... Des gouttes sirupeuses et brûlantes d'euphorie, si visqueuses qu'on peut les prendre à main nue...

Par son intervention fortuite et insoupçonnée, il avait sauvé un bébé humain mourant une fois. C’était un peu tout ce qui donnait du sens à sa vie.

Mais tout aimable sauveur de bébé qu’il aie été, personne n’était jamais prêt à affronter les remontrances d’un contremaître.

Ah, bien sur, Albert avait prévu ce moment, il avait une grande stratégie, un plan infaillible… Mais est-ce que cela allait marcher ? Était-ce le moment ?

La pluie frappait fort à la lucarne, ce qui, à l’extérieur, serait à son désavantage. Les gouttes sur les grilles métalliques, les gouttières, les vitres, menaient un rythme infernal. Tip. Tap. Titip. TipTapTitip. TiptaptitipTiptaptitipTiptaptitipTiptaptitip, « Oh sinnerman, where you gonna run to? » semblait accuser Nina Simone, « Homme pêcheur, ou t’enfuiras tu ? »

Il n’était pas un homme, décida-t-il finalement.

Il attrapa de derrière le mur l’aiguille à coudre, et poussa légèrement la vitre.
Dehors, le vent était fort, et l’air était chargé de l’odeur d’ardoise humide des tuiles, et de la mousse qui colonisait les murs.

Le gremlin sauta sur le toit en contrebas, et Roy le rejoint rapidement. Il put rapidement s’apercevoir de la lueur avide dans les yeux du gobelin.

— Ecoute Albert, lança Roy avec sa voix rocailleuse, appuyée par un regard prédateur qui rappelait les mauvaises rencontre avec un renard, c’est pas que je t’apprécie pas, mais les chiffres sont les chiffres. Tu me dois ton quota de followers, ton retard est déjà chiffré à 6317 euros.

Albert aurait voulu répondre que le quota n’était pas tenable. Que les autres gremlins comme lui ne tenaient plus la cadence.
Bien sur que l’anonymat de l’informatique et de l’internet, et le besoin de main d’œuvre qualifiée et peu chère pour alimenter les réseaux sociaux et sites de critiques, permettaient au petit peuple de vivre.
Mais face aux machines qui étaient maintenant plus rapides que des armées de petites créatures, générer des contenus, des follows, de la réputation, devenaient peu rentables et invivables. Ce n’était pas le Brazil de Gilliam, c’était l’administration façon Rimsky Korsokov mentor d’Alekseï Stakhanov.

Le petit clerc regarda derrière lui, se demandant s’il avait une dernière chance de renoncer. En haut de la pente du toit, et des obstacles à escalader, la lucarne paraissait s’éloigner, comme si elle s’enfuyait devant les événements. Et à sa petite échelle, elle était devenue un danger en elle même, claquant dans le vent au rythme du boléro.
Ses doigts se crispèrent autour du fut de métal. Un spasme agita le phasme sur son dos en réponse.

Il répondit enfin
— Roy, tu me crois né du dernier centenaire.

Ses frêles épaules se crispèrent. Il leva l’aiguille, comme prêt à en faire usage.

Les deux créatures se jaugèrent dans une tumulte de sentiments, comme deux grandes gerbilles, d’ordinaires paisibles, prises dans le brouhaha infernal de leur environnement furieux.
Les bourrasques de vent, chargées de débris lacérants, hurlaient comme les cuivres de Charles Mingus menant la charge cavalière de l’armaggedon sur Moanin’.
L’ambiance était Junk/Jazz, emplie d’odeurs de béton mouillé et de rouille en suspension.
Elle avait un goût de laiton, ce laiton classe de speakeasy haut de gamme, pas le laiton administratif aux relents de tabac bon marché.

Les gouttes grossissaient en taille, devenant progressivement des bombes. Les ondulations de la toiture, des tranchées. A leur droite, un moucheron succomba sous un micro-grêlon en formation.

Albert étudia longuement les griffes parfaitement entretenues de Roy.

Puis il soupira. Il était temps qu’il révèle le plan qu’ils avaient tous fomenté.
— Roy, je suis le premier à te le dire, mais nous allons tous faire de même. Nous nous sommes inspirés de nos voisins humain. A compter d’aujourd’hui, je suis déclaré en banqueroute, expliqua Albert.

Puis, il pris le temps que l’information prenne le temps d’être traitée avant de continuer
— En conclusion, tu n’auras jamais ton argent
— Non, hurla le gobelin, tu mens !

Il fit mine de s’avancer vers Albert quand celui ci pointa son épée de fortune en direction de son adversaire
— Je ne mens pas Roy, rétorqua-t-il dans un râle mauvais, tu vas vite t’en rendre compte. Donc maintenant, tu prends tes griffes incapables de déterrer du gravier, et tu dégages voir tes maîtres et leur dire que c’est fini pour nous.

Paniqué, Roy sortit de derrière son dos le petit portefeuille en écaille de tortue qui lui servait de bouclier et tenta de s’approcher pour dominer son frêle opposant.
Mais celui ci était vieux, et un simple objet d’apparat. Le contremaître, maladroit, perdit l’équilibre sur une plaque de lichen dans un couac de clarinette.

Albert jubila en entendant le bruit du portefeuille, échappé des mains de son propriétaire affolé, se briser en 6137 pièces, en camaïeu orange sur l’ardoise grise.
Il rit nerveusement, puis, enfin, après quelques secondes sous la pluie, joyeusement, du fond du cœur en voyant son oppresseur s’enfuir à toutes jambes, claquant un Blue Rondo à la Turk de ses pattes griffues sous les pignons.

Ce soir ce serait Brandy pour tous les gremlins de Londres ! L’excitation de la révolte les tiendrait tous éveillés jusqu’à la fin de la nuit dans les bars clandestins !


J'ai énormément d'admiration pour les écrivains qui respectent scrupuleusement leur langue, et autant de mépris pour les poètes qui font de même -
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Message posté le 15:04 - 26 mai 2016




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Ce deuxième texte m'a un petit peu moins emballé que le premier. Ceci étant, c'est intéressant de voir ce qui peut être fait à partir d'une même source.
Le troisième sera ma lecture de demain (si je n'oublie pas O: ).

Édit : il y a un souci de balise quelque part dans mon message, je n'ai pas le temps de chercher le problème, je laisse ainsi pour le moment.

Édit 2 : Trouvé. Ça ne veut pas que j'affiche « sûr » entre crochet...


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Message posté le 18:21 - 26 mai 2016

On n'avait guère de place que pour des poumons ou un système digestif. (et ajout d'une parenthèse pour une observaton délirante qui personnalise le gremlin: exemple à la volée " ce qui posait un problème évident pour les déjections, justifiant un peu la réputation olfactive que les gremlins ont acquis depuis qu'ils ont adopté la coutume du "manger")

Londres contre Athènes (pour rendre plus cohérent le gob et le grem?) n'était pas essentiel, Athènes pouvait très bien fonctionner (et les métaphores tectoniques étaient sympathiques d'ailleurs)

Il y a une différence à mes yeux entre la lumière gélatineuse (aucun sens particulier, juste sensation esthétique et "surréaliste" si on veut: ça n'engage rien de physique ni meta-universel: on ne va pas pour autant patauger dans tout ce qui est lumineux) et piler des écailles de mite en fond de teint ou porter un phasme (délire tout à fait "réaliste" au fond dans un univers merveilleux: on fait bien des cosmétique avec de la graisse de léviathan...). N'ayant pas lu pratchett je pense que c un peu son style? le coup de la viande est hésitant entre les deux par exemple, il me semble, et peut être (hypothèse justifiant au titre d'hypothèse ce paragraphe) parce que tu as pensé "références"?; pour "personnaliser" ce style d'écriture composite (qu'l soit "uni" et personnel: influences lisibles ou pas on s'en carre du coup, c'est un "nouveau" style), penses y et prends la solution la moins "vian" ou "pratchett", et la plus "personnelle", même (ou surtout si, pourquoi pas) elle ne ressemble à rien comme référence mentionnable dans ton esprit (le lecteur voit ce qu'il veut là où il veut de toute façon.... pas besoin de s'en soucier pour lui: les oeufs mimosas par exemple m'évoquent beaucoup de choses, et entre autres trucs pas "communs": le nazisme (écouter "die eier von satan" de tool: recette d'oeufs déguisée en discours fasciste avec foule qui applaudit): je prendrai pas le temps d'expliquer ça au lecteur, même si j'ai envie de me glisser une private joke dans la phrase (qui résulterait essentiellement en truc surréaliste ou pratchettien susmentionné): pas utile, pas le temps, pas mon problème au fond: et le lecteur de toute façon même si tu lui sers une petite bergerette toute mignonne dans des marguerites il serait capable de le politiser et te transformer en tyran... l'essentiel reste donc "le plaisir de retranscrire", même si il s'échappe un peu dans l'incohérence des références).

J'aimais bien les gerbilles dans la pluie: plus poétique à mon sens.

Globalement le texte semble moins improvisé que le premier, plus nourri pensé (posé, et ça se sent dans le style parfois beaucoup plus fluide et "phrasé", musical, pas seulement à cause des références musicales même si ça joue forcément un peu).
Si on peut regretter certains éléments de chacun (disons la fraicheur du premier, le délire d'univers bien barré qui se créait dans le second) il est bien équilibré, peut être le meilleur des 3 (à voir avec le premier). A mon sens. Bon compromis entre les deux en tout cas, ça passe bien.

Cela dit je vois que vous êtes un fâcheux monsieur. Je vous avais prévenu au propos des écailles et je ne vois que de l'indélicatesse étalée dans ces remugles de "travail". Je ne vous salue pas.

Le lézard file, griffes battant l'intro de chop suey.

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